L’expertise des rédacteurs :

l’exemple de l’analyste des débats au Sénat

Capture d'écran Word : icône de page

Le métier de rédacteur professionnel de compte rendu est souvent peu valorisé. Pourtant, comme en témoigne le concours d’analyste des débats du Sénat, il requiert une certaine expertise : un bagage important et des compétences spécifiques.

Les analystes des débats remplissent une double mission :
  • assurer la rédaction, la numérisation et l’impression du compte rendu analytique officiel des débats du Sénat en vue de sa diffusion ;
  • participer à la rédaction des comptes rendus des commissions.
Le compte rendu analytique donne une relation méthodique et concise des débats, en séance publique comme en commission. Le métier d’analyste des débats requiert, tout au long de la carrière, curiosité d’esprit, goût de la langue française, mais aussi une très bonne culture générale et un intérêt pour l’actualité et la vie politique et institutionnelle, afin d’appréhender de façon aussi exacte que possible toutes les questions dont le Parlement est amené à débattre.

Source : www.senat.fr

Le Sénat comporte deux services de rédaction, l’un dédié à la rédaction intégrale des débats et l’autre à l’analyse des débats, c’est-à-dire à une rédaction synthétique de comptes rendus. Les analystes des débats bénéficient du statut de cadre de catégorie A, comme les administrateurs du Sénat.
Les assemblées parlementaires ont conservé un respect de la chose écrite, qui est moins répandu ailleurs.

Questions à un ancien rédacteur freelance, devenu analyste des débats

Nous avons posé quelques questions à Thomas Fourquet, reçu récemment au concours d’analyste des débats au Sénat. Thomas exerçait une activité de rédacteur freelance de comptes rendus de réunions professionnelles depuis 8 ans lorsqu’il s’est présenté au concours d’analyste des débats ainsi qu’à celui de rédacteur des débats. Outre l’intérêt du contenu des discussions parlementaires, ce métier se situait dans le prolongement de son activité de rédacteur freelance et offrait à la fois stabilité, rémunération et statut intéressant. Interrogé sur les compétences des analystes des débats, Thomas Fourquet évoque plusieurs domaines :
  • la maîtrise de la langue et une bonne culture générale, car dans ces concours seules les « têtes bien faites » sont recrutées. En effet, un analyste des débats s’occupe de la loi, qui couvre tous les domaines de l’activité humaine. Il touche donc à tous les sujets d’actualité.
  • la capacité à travailler vite et sous contrainte. Les rédacteurs travaillent à partir des notes qu’ils prennent à la volée, lors des séances du Sénat. Contrairement aux rédacteurs qui travaillent sur de l’intégral et utilisent l’enregistrement pour restituer exactement ce qu’il s’est dit, les analystes, comme on les appelle au Sénat, doivent réaliser un compte rendu synthétique qui ne s’appuiera sur l’enregistrement qu’en cas de besoin.
  • l’aptitude à ne rien manquer d’important dans ce qui est dit, ce qui implique de disposer d’une certaine aisance. Pour cela, le rédacteur s’appuie sur sa propre culture générale pour comprendre les sujets abordés en séance qui sont, bien souvent, très techniques. Il faut donc avoir au moins des notions sur le sujet de la discussion et une certaine agilité d’esprit.
Quant à la capacité de synthèse elle-même, Thomas évoque à la fois la capacité à distinguer l’essentiel de l’accessoire, et le travail de reformulation visant à supprimer les marques de l’oralité sans nuire au sens du discours.

Comment expliquer que la compétence de synthèse et de mise en forme, la culture générale du rédacteur, ne soient pas forcément reconnues dans les entreprises ?

Thomas : Je pense que cela s’explique par le fait que la maîtrise du langage est de moins en moins valorisée. Je ne veux pas faire de généralité, mais nous vivons dans un monde où ce qui importe est la fonction du langage, la fonction de communication, c’est-à-dire de faire passer des informations. Cela conduit sans doute à moins prêter d’attention à la forme. En parallèle, le niveau de base s’élève. Nous sommes de plus en plus nombreux à maîtriser le langage : de plus en plus de personnes sont diplômées. Je pense donc qu’il se produit deux phénomènes concurrents et, au bout du compte, tout le monde s’imagine pouvoir très aisément réaliser un compte rendu. Je pense que tous ceux qui travaillent dans la communication sont victimes de ce phénomène. De ce point de vue, les assemblées parlementaires ont conservé un respect de la chose écrite, qui est moins répandu ailleurs.

Crédit photographie : Photo Sénat – © Sénat

En savoir plus