Flex office : alternative à l’open space ?

Même si seulement 1 salarié français sur 5 travaille dans un open space, nous avons tous l’image de ces box installés sur d’immenses plateaux sans âme popularisés par les films et séries américaines. Ceux qui vivent cette organisation connaissent les mêmes difficultés au quotidien : perturbations sonores, visuelles, voire olfactives quand un voisin déguste ses choux de Bruxelles à son bureau.

Né dans les années 1950, ce type d’organisation a vécu. Aujourd’hui, un nouveau concept d’aménagement se développe dans nos entreprises : le flex office, ou espace de travail dynamique. Accenture, Danone ou Sanofi l’ont adopté. En septembre, le siège de PSA s’y mettra.

Le principe est simple : adieu les espaces dédiés, bonjour le partage de postes de travail. Selon le baromètre annuel d’Actineo/CSA, 9 % des salariés n’avaient plus de bureau personnel en 2015. Désormais, le flex office et le desk sharing sont systématiquement à l’étude dans les projets d’aménagement d’espace.

Alliant suppression du bureau individuel et de l’open space, l’espace de travail dynamique est-il la solution miracle qui allie optimisation de la surface de travail et bien-être au travail ? Convient-il à tout le monde ? Nous allons tenter d’y voir plus clair.

Tout d’abord, nous ferons un point sur le sens même de flex office. Puis nous présenterons les objectifs de celui-ci. Enfin, nous nous attarderons sur les conséquences de cette organisation sur le quotidien des utilisateurs.

Définition

Le flex office est une organisation du travail qui se veut dynamique. L’environnement du salarié ne se présente plus comme un cadre contraint, mais comme une panoplie de solutions à la carte pour le collaborateur :

  • télétravail
  • missions plus ou moins longues chez le client
  • poste de travail partagé dans un espace de 10 personnes maximum
  • ambiances de travail différentes permettant tantôt de se concentrer, tantôt de travailler en brainstorming…

Le flex office est pratiquement toujours associé au desk sharing ou « poste de travail partagé ». Le collaborateur ne dispose pas de bureau dédié : lorsqu’il arrive le matin, il récupère ses affaires (ordinateur portable, souris…) dans un casier personnel et s’installe à un bureau libre.

Objectifs

Moins de mètres carrés

Mobilité des salariés (chez les clients ou en télétravail, par exemple), travail en mode projet, accroissement des réunions et utilisation des technologies mobiles… les salariés passent de moins en moins de temps assis à leur poste. En comptant les absences pour congé ou maladie, en Ile-de-France, les postes de travail ne sont occupés que 50 % à 60 % du temps en moyenne sur l’année !

En sachant que les établissements manquent généralement de salles de réunion adaptées à leur besoin et qu’un poste de travail coûte jusqu’à 15 000 euros par an à Paris, l’allocation des surfaces dans nos entreprises constitue une véritable problématique.

Le flex office se présente dans ce cas comme une solution. En supprimant les postes inoccupés et en mutualisant ceux qui restent, les sociétés peuvent réaliser des économies, mais surtout utiliser les surfaces gagnées pour d’autres objectifs : box, salle de réunion, cabines téléphoniques, cafétéria, espace de sport ou de sieste… pour diversifier leurs environnements de travail.

Ainsi, Danone a transformé les 40 % de postes de travail en moyenne inoccupés par des salles de réunion. Elle a en plus mis en place de nouvelles propositions de travail qui n’existaient jusqu’alors que dans les start-ups : coins salon, cuisine et salle à manger, salles de silence…

Attention à ne pas supprimer plus de postes que de besoin, au risque que les salariés perdent du temps tous les jours à chercher une place disponible, comme c’est le cas sur le site de Gentilly de Sanofi.

Plus de communication

Au-delà de la réduction des surfaces de travail, et donc des coûts, le flex office permet de casser les silos qui peuvent exister aujourd’hui dans les entreprises. En effet, les espaces sont traditionnellement organisés en services. Or les salariés ont parfois besoin d’avoir plus d’interactions avec des membres d’autres pôles que le leur. Avec cette organisation du travail, les collaborateurs peuvent se regrouper un temps pour mener à bien un projet.

Plus de dynamisme… et de bien-être

Le concept s’inscrit dans une philosophie plus générale d’un environnement de travail à la carte. Suivant les tâches qu’il souhaite réaliser, le salarié choisit son environnement : chez lui pour se concentrer, au bureau pour des réunions ou du travail collaboratif, etc.

Finie l’époque où l’entreprise imposait une méthode de travail à des personnes bien différentes, c’est maintenant elles qui modèlent la société, comme l’explique Marc Thiollier, secrétaire général d’Accenture :

Nous avons recensé toutes les situations de travail des employés : nous en avons identifié 200 et nous avons créé une quinzaine d’espaces qui correspondent à ces situations.

Ainsi, le salarié peut ici travailler dans le silence quand il a besoin de rédiger ou de se plonger dans des tableaux de chiffres, là discuter quand il le faut sans avoir l’impression de gêner, etc. C’est donc une solution aux 150 perturbations dont peut être victime une personne en open space.

En revanche, si vous vous trouvez dans une quiet room, ou « salle de silence », et que vous avez besoin d’échanger spontanément avec votre collègue, la situation peut être délicate, comme l’explique Idir Sedeki à L’Humanité :

Quand vous devez discuter d’un point avec vos collègues, vous ne pouvez pas le faire à votre poste, sinon vous dérangez les autres. Il faut trouver une salle de réunion et s’il n’y en a pas de libre, il faut programmer une réunion !

Conséquences

Un lien managérial compliqué

La problématique du flex office est la même que pour le télétravail. Le management ne peut plus se faire uniquement par un contrôle des tâches ou des horaires, le salarié étant libre d’aller où et quand bon lui semble. Les responsables d’équipe doivent donc passer d’un rapport de contrôle à un lien de confiance avec leurs managés.

Une territorialisation impossible et une appartenance à l’entreprise difficile

Dans une société où la territorialisation de l’espace est capitale, et où la position et la taille du bureau reflètent l’importance du collaborateur dans l’entreprise, ne plus posséder un espace peut être compliqué.

Cette mise en commun de l’espace peut soulever la question de l’appartenance même à l’entreprise. Laisser un peu de soi en partant, c’est la certitude de retrouver sa place. Qu’en est-il quand on rentre tous les soirs avec ses effets personnels ? Pour utiliser une métaphore, le risque n’est-il pas de troquer un foyer pour une vie à l’hôtel ?

Cela peut être le cas chez Danone où la rigidité interdit de boire ou manger sur le poste de travail ou de partir en réunion sans ses affaires et où une table doit être libérée si vous prévoyez de ne pas revenir avant 15 minutes. Le sentiment pour les salariés peut être celui de gêner ses voisins et de rester plutôt chez eux… et donc de préférer le télétravail au bureau. C’est d’ailleurs l’avis d’Yves Lasfargues, expert en télétravail au cabinet Obergo, qui estime que « détériorer les conditions de travail avec le “flex office” est une manière de pousser les gens vers le télétravail ».

Un isolement involontaire

Enfin, dans un environnement où un collaborateur est contraint à changer de place tous les jours et ne plus croiser les mêmes personnes au quotidien, nouer des relations peut être difficile. Pour reprendre une analogie, l’effet peut être le même qu’à l’école où, dans une classe, un élève trouve sa place et peut lier des amitiés, ce qui ne se produit pas à la bibliothèque.

Attention dans ce cas à ne pas mêler open spaces et flex office. Mixer immense plateau sans âme ni vie et espace de travail partagé peut repousser les salariés et les inviter plutôt à rester chez eux. Au contraire, le flex office doit être une alternative à l’open space bruyant et source de perturbations.

Les équipements à disposer pour passer au flex office :

 

  • casiers pour ranger les affaires personnelles
  • ordinateur portable
  • socle pour ordinateur portable
  • portabilité du numéro de téléphone
  • système de réservation de salles.

Conclusion : un espace de travail flexible à bien encadrer pour atteindre ses objectifs

Le flex office répond à un vrai problème dans nos entreprises : nous manquons d’espace de réunion ou d’isolement, alors même que pratiquement la moitié des postes de travail sont vides tous les jours. En outre, il permet de proposer différentes situations de travail que les salariés peuvent adopter suivant leurs besoins.

En revanche, il ne faut pas le déployer sans préparation des salariés, car il implique une véritable transformation de l’organisation de travail et d’être à l’entreprise, qui peut aller jusqu’à l’isolement, si la conduite du changement n’est pas bien menée. Cela passera par de la formation des responsables au management à distance, mais aussi des actions concrètes pour conserver le sentiment d’appartenance des salariés à l’entreprise. Des rendez-vous réguliers réunissant tous les membres d’une même équipe peuvent faire l’affaire – mais pour cela, faut-il encore disposer de suffisamment de place pour les accueillir tous en même temps !

Et vous, le flex office, ça vous tente ?