Qualité de vie au travail : notions clés

Soutenu par le législateur, le concept de qualité de vie au travail fait l’objet d’une attention croissante au sein des entreprises, de la part des salariés, mais également des dirigeants. Nous vous présentons ici les principales notions pour démarrer une réflexion sur le sujet.

La qualité de vie au travail a fait l’objet d’un Accord National Interprofessionnel (ANI) en 2013. Cet accord retient en préambule le principe selon lequel « la performance d’une entreprise repose à la fois sur des relations collectives constructives et sur une réelle attention portée aux salariés en tant que personnes ». Les entreprises sont incitées à expérimenter de nouvelles manières de concilier performance et mise en œuvre d’organisations du travail favorisant les conditions de travail et de vie des salariés.

Depuis la loi relative au dialogue social et l’emploi du 17 août 2015, dite loi Rebsamen, que nous avons déjà évoquée à plusieurs reprises, la qualité de vie au travail doit faire l’objet d’une négociation annuelle obligatoire, regroupant entre autres les sujets de l’égalité professionnelle hommes/femmes, du handicap et de la protection sociale complémentaire.

La préoccupation de plus en plus forte pour la qualité de vie au travail (QVT pour les spécialistes) répond à trois phénomènes : une recherche toujours plus importante de performance au sein des entreprises, l’existence de plus en plus manifeste de risques psychosociaux (1) dans un nombre croissant de structures et une compétition entre ces mêmes entreprises pour présenter la plus forte attractivité auprès des salariés qu’elles souhaitent recruter ou garder. Sur ce dernier point,  la communication de grands groupes autour d’un palmarès comme la distinction « great place to work » me paraît à ce titre assez frappante. La qualité de vie au travail est visiblement devenue aussi importante que le secteur d’activité, la nature des postes, voire le niveau de rémunération.

Quelle définition pour quels enjeux ?

Je paraphrase ici une définition de la qualité de vie au travail par l’ANACT (Agence nationale pour l’amélioration des conditions de travail) :

La perception de la qualité de travail par les salariés est déterminée par les conditions dans lesquelles ils exercent leur travail et par leur capacité à s’exprimer et à agir sur le contenu de ce dernier.

Que retenir de cette définition ? Premièrement, le fait qu’il s’agit d’un ressenti, et donc de situations individuelles vécues au travers d’un collectif. Il en ressort également que cette perception est influencée à la fois par de multiples facteurs externes et par le degré d’autonomie dont bénéficie un(e) salarié(e) à son poste.

Voici une liste synthétique des enjeux auxquels répond l’amélioration de la qualité de vie au travail :

  • Développement de l’attractivité de l’entreprise ;
  • Augmentation de la créativité ;
  • Développement de l’engagement des salariés dans leur travail ;
  • Augmentation de la motivation  professionnelle ;
  • Fidélisation des salariés ;
  • Réduction des effets du stress au travail et par là, limitation des pathogènes et des effets destructeurs associés, tant pour l’organisation que pour les personnes ;
  • Diminution de l’absentéisme.

Pourquoi la qualité de vie au travail est-elle d’actualité ?

Nous n’entrerons pas ici dans une dissertation sur les risques psychosociaux (dont la complexité nécessiterait très probablement plusieurs articles et l’éclairage de spécialistes) mais voici une hypothèse simple qui me paraît adaptée : alors que la pénibilité physique du travail diminue globalement dans de nombreux secteurs d’activité, grâce aux machines, l’organisation du travail devient de plus en plus complexe et contraignante et la charge mentale comme la pression psychologique augmentent.

Sur ce dernier point, on peut invoquer à la fois la compétition croissante entre entreprises dans tous les secteurs ou presque, la menace du chômage, l’instabilité chronique des organisations dans un environnement souvent hostile (crises économiques,  rachats, etc.) ou encore les éventuels conflits éthiques vis-à-vis du comportement de son employeur (scandales financiers, atteintes à l’environnement, évasion fiscale, plan de licenciement). Le climat social est pour finir un autre facteur puissant, auquel il faut ajouter les difficultés de conciliation entre vie professionnelle et vie personnelle.

Le groupe Cegos a publié un baromètre intéressant sur la qualité de vie au travail et le climat social, réalisé durant l’été 2015, à partir d’un échantillon de 1204 personnes travaillant dans des entreprises du secteur privé de plus de 100 salariés. Il en ressort un bilan mitigé : les salariés y font état d’une qualité de vie au travail en progrès et satisfaisante, mais le climat social est dégradé et les risques psychosociaux sont en augmentation.

Quelques chiffres marquants de l’étude :

  • 61 % des salariés voient leur travail comme une source d’épanouissement personnel ;
  • 50 % des DRH et RRH interrogés ont mené au moins un projet d’amélioration de la qualité de vie au travail durant l’année ;
  • Près de 3 salariés sur 4 positionnent leur niveau de stress à 7 et plus sur 10.

Comment agir ?

L’ANACT définit les leviers d’action suivants :

  • Relations sociales et professionnelles : reconnaissance du travail, respect, écoute, considération des collègues et de la hiérarchie, information, dialogue social et participation aux décisions ;
  • Contenu du travail : autonomie, variété des tâches, degré de responsabilité ;
  • Environnement physique du travail : sécurité, bruit, chaleur, éclairage, propreté, cadre spatial ;
  • Organisation du travail : qualité de la prescription du travail, capacité d’appui de l’organisation dans la résolution des dysfonctionnements, démarches de progrès organisationnel, pénibilité, charge de travail, prévention des risques professionnels ;
  • Réalisation et développement professionnel : rémunération, formation, validation des acquis, développement des compétences, sécurité des parcours professionnels ;
  • Conciliation entre vie au travail et vie hors travail : rythme et horaires de travail, vie familiale, accès aux services, loisirs, transports.

A ces leviers s’opposent des phénomènes récurrents dans les organisations, comme les injonctions contradictoires (rapidité et qualité) ou les prescriptions floues, sans parler des situations (minoritaires, mais destructrices) de harcèlement.

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Les conseils des pros

Pour finir, voici des recommandations pour la réalisation d’actions efficaces d’amélioration de la qualité de vie au travail. Je résume ici un contenu trouvé sur le site d’une entreprise spécialisée dans la santé et la sécurité au travail, qui me paraît tout à fait pertinent au regard de quelques échecs de projets de ce type (malgré des ambitions parfois importantes) que j’ai pu rencontrer dans différentes entreprises :

  1. Disposer de données factuelles, repousser les opinions toutes faites ou simplistes, construire une réponse rationnelle et documentée, basée sur une connaissance précise de la réalité du travail et des personnes : une réponse purement émotionnelle ou fondée sur un a priori générera des mesures dérisoires ou sans effet, voire dégradera le lien entre dirigeants et salariés, qui pourront se sentir floués ;
  2. Permettre l’adhésion et la coopération active des acteurs de l’entreprise, éviter les démarches purement « top-down » : une démarche participative est un réel facteur de réussite ;
  3. Connaître les meilleures réalisations dans des activités similaires à l’extérieur : le repli sur soi est très fréquent dans les entreprises et peut conduire à des impasses. Autant procéder à une comparaison avec les projets des autres entreprises et s’inspirer des modèles qui réussissent.

Pour aller plus loin :

  • 10 questions sur la QVT de l’ANACT
  • Une publication de l’INSEE sur la notion de charge mentale
  • La page d’une autre entreprise spécialisée en santé et sécurité au travail (comme ça, je ne fais pas de jaloux), expliquant le modèle de Karasek pour la mesure du stress professionnel
  • Un dossier de l’INRS sur le stress et les risques professionnels